Suicide de notre collègue Christine Renon : Un an après, le point sur l’enquête votée par les organisations syndicales siégeant au CHSCT 93.
Communiqué intersyndical du 20 novembre :
L’enquête du CHSCTD (Comité d’Hygiène, de Sécurité, Conditions de Travail Départemental) de Seine-Saint-Denis sur le suicide de Christine Renon a commencé en septembre 2020, un an après le drame. La décision de mener cette enquête avait été votée le 3 octobre 2019 par les organisations syndicales siégeant à un CHSCTD extraordinaire.
En janvier 2020, la direction des services départementaux de l’Éducation nationale de Seine-St-Denis avait reconnu le suicide de Christine Renon comme imputable au service. Par cette décision, qui a résulté d’une démarche entreprise par la famille, la DSDEN 93 reconnaissait sa responsabilité dans ce drame. La lettre laissée par Christine Renon ne laissait en effet aucune place au doute quant au fait que la détérioration de ses conditions de travail l’avait poussée à bout. Nous rappelons que ce suicide n’est pas un cas isolé. Chaque semaine en France, un agent de l’Éducation nationale se suicide (58 suicides en 2018-2019), bien plus encore tentent de le faire. Dans la majorité des cas, cela se passe en dehors du lieu et du temps de travail. Ces suicides et ces tentatives de suicide sont, pour la plupart, passés sous silence. Faire reconnaître leur lien avec une organisation du travail pathogène s’avère souvent très difficile.
L’enquête du CHSCTD du 93 a pour objectif de déterminer les facteurs liés à l’organisation du travail qui ont amené Christine Renon à se suicider. Elle doit produire un rapport d’analyse et faire voter des préconisations au CHSCTD pour exiger des mesures de prévention de la part de l’administration sur les risques suicidaires dans l’Éducation nationale. Pour les syndicats, les préconisations sont forcément liées aux revendications des personnels. Il est évident que le manque de moyen et de postes, que les conditions de travail exécrables, que les réformes destructrices de ces dernières années, que l’absence de protection de la hiérarchie et la pression mise sur les collègues (là, en particulier les directeurs…) ont un lien direct avec l’acte de Christine. Ses deux courriers (un à ses collègues directeurs et directrices et un à deux syndicats du premier degré) l’expliquent. Des préconisations sans satisfaire les revendications des collègues, c’est permettre au ministère de se dédouaner de ses responsabilités. Nous veillerons, en toute indépendance vis-à-vis de la DSDEN, à ce que le résultat de l’enquête tienne compte de cela d’abord.
Afin de mener à bien cette enquête, une délégation composée de 14 personnes (7 membres de l’administration et 7 membres des organisations syndicales), accompagnée par le cabinet d’expertise SECAFI, doit analyser des documents et mener des entretiens avec des personnes du cercle professionnel de Christine Renon (collègues de l’école, inspecteurs et inspectrices de circonscription, directions d’écoles, parents d’élèves, personnels de la mairie …). Nous, représentants des personnels au sein de l’instance paritaire du CHSCT 93, nous engageons à mener cette enquête avec la plus grande détermination et à faire en sorte que tous les documents permettant d’analyser les difficultés professionnelles et risques psycho sociaux générés par l’organisation du travail vécus par Christine Renon soient fournis par l’administration. Nous nous engageons également à entendre les témoignages des personnes ayant côtoyé Christine Renon dans son environnement professionnel. Les organisations syndicales veilleront au bon fonctionnement de cette enquête. Elles cherchent à obtenir les documents utiles et à obtenir l’accord de témoignages importants. Elles reviendront, systématiquement, sur l’importance, pour mener à bien cette enquête, des deux courriers écrits par Christine et qui doivent nous orienter pour aller chercher des réponses…
Les organisations syndicales représentées au CHSCTD (FSU / FO / CGT / SUD) s’interrogent sur la gestion de l’enquête par l’administration. Il nous paraît important de ne pas minimiser les enjeux de celle-ci. En effet, la mort de Christine Renon a mis au jour une réalité trop souvent niée par l’Éducation nationale : celle de la dégradation des conditions de travail. Les personnels sont confronté·es à la précarité grandissante des habitant·es du département sans bénéficier des moyens nécessaires pour y faire face. La charge de travail est toujours plus importante alors que les conditions matérielles et sanitaires sont déplorables. Avec 86 médecins du travail pour plus d’un million de personnels et une gestion managériale des ressources humaines, la situation ne cesse de se dégrader d’autant plus dans cette période de crise sanitaire où l’impréparation du ministère et le manque de moyens mettent en danger les personnels, les élèves et leurs familles. Le ministre Blanquer s’entête dans ses projets de réformes impopulaires : après la loi pour l’École de la confiance et les réformes du bac et du lycée, il entend s’attaquer aux directions d’école pour renforcer une organisation hiérarchique et pathogène du travail, calquée sur celle des collèges et des lycées. Afin que cette enquête puisse atteindre son objectif qui est d’améliorer les conditions de travail des personnels de l’Éducation Nationale, afin que ce type de drame ne se reproduise plus jamais, les organisations syndicales siégeant en CHSCTD 93 travailleront à ce que cette commission d’enquête donnent lieu à des préconisations concrètes.
L’intersyndicale SUD Éducation 93, FSU 93, FNEC-FP-FO 93 et la CGT Educ’action 93